dimanche 28 février 2021

Analyse comparative entre deux modèles simplifiés de l’atmosphère

Auteur : Jean-Claude Keller, Publié en février 2021

Ces dernières années, les causes anthropiques du réchauffement climatique, mises en évidence dans les travaux du GIEC, ont souvent été dénoncées, notamment sur les réseaux sociaux. Parmi les arguments avancés par ces détracteurs, on entend régulièrement que les travaux du GIEC ne prennent pas suffisamment en compte les lois de la thermodynamique pour modéliser l’évolution des températures, certains vont même jusqu’à accuser le GIEC de faire de la pataphysique !

 

L’objectif de cette analyse est de décrire les limites de prédictions de 2 modèles très simplifiés, un modèle d’équilibre des flux d’énergie radiative d’une part et un modèle de la théorie des gaz parfaits d’autre part.

Commençons par le modèle des flux d’énergie radiative, en considérant une atmosphère sèche à une couche, de température constante Ta. On définit 4 flux d’énergie à courte longueur d’onde, shortwave (de 0,2 à 3 µm environ) : flux solaire incident au sommet de l’atmosphère, part du flux solaire incident transmis à la surface sans être absorbé par l’atmosphère, part du flux solaire incident réfléchi par la surface de la Terre, part du flux solaire incident réfléchit par la surface et transmis à l’espace sans être absorbé par l’atmosphère. On définit encore 4 flux d’énergie IR thermique, longwave (de 4 à 60 µm environ) : flux IR transmis à l’espace par l’atmosphère, flux IR transmis à la surface par l’atmosphère, flux terrestre transmis par le sol à l’atmosphère, part du flux terrestre transmis à l’espace sans être absorbé par l’atmosphère.

En écrivant d’une part l’équilibre des flux d’énergie échangés entre l’atmosphère et le sol, et d’autre part l’équilibre des flux échangés entre l’atmosphère et l’espace, on obtient 2 équations à 2 inconnues (Ts et Ta). Et on en tire la formule suivante :  Ts4 = [0,7 S0/4sigma (2-asw)/(2-alw)]  avec l’absorptivité (coefficient d’absorption atmosphérique) asw pour les ondes shortwave et alw pour les ondes longwave. Cette formule prédit une température Ts de 286°K avec des coefficients d’absorption atmosphériques proches du comportement réelle de l’atmosphère (asw=0,1 et alw=0,8). Autre conséquence importante de la formule : dans le cas où alw est supérieur à asw, alors plus alw est important et plus la température du sol sera importante.

Venons-en maintenant au modèle des gaz parfaits, en considérant une atmosphère sèche en équilibre hydrostatique, soumise à des échanges adiabatiques et composée d’un gaz diatomique (Cp/Cv=7/5). On obtient que Cp dT = dp/p, et en tenant compte de l’équilibre hydrostatique, on obtient le gradient de la température : dT/dz = - g/Cp , avec g=9,81 ms-2 et Cp = 1006 J/kg°K, ce gradient vaut -0,00975 °K/m. En ce qui concerne la pression en fonction de l’altitude. Il faut différencier l’équation d’état des gaz parfaits pour obtenir p = ρ (Cp-Cv) T . Puis introduire le rapport Cp/Cv et la relation hydrostatique, puis faire un développement mathématique avec un changement de variable pour obtenir la relation cherchée :

p = p0 exp[-7g/(2CpT0)  z]. Pour z=0 et T=288°K, on obtient un gradient de -12 Pa/m.

Ce gradient de température et ce gradient de pression sont proches des valeurs que l’on peut observer dans une situation météorologique se rapprochant des hypothèses faites. Il faut encore remarquer que la pression en fonction de l’altitude dépend de la température au sol.

Lorsqu’on analyse les résultats de ces 2 modèles, voici ce que l’on peut dire :

1. C’est le modèle radiatif, et pas le modèle des gaz parfaits, qui fixe la température du sol.

2. Le modèle des gaz parfaits décrit la température et la pression dans la troposphère uniquement si l’on connaît à priori la température au sol.

3. Dans la troposphère, il y a des gaz (vapeur d’eau, CO2, CH4, N2O, ChloroFluoroCarbonés, …) qui sont quasi transparents au rayonnement solaire (shortwave), mais qui sont partiellement opaques au rayonnement IR terrestre (longwave). Avec de tels gaz présents dans la troposphère, on est dans une situation où le coefficient d’absorption longwave et supérieur à celui shortwave. Cela signifie que l’atmosphère terrestre n’absorbe que très peu de rayonnement solaire; mais par contre, qu’elle absorbe une quantité non négligeable de l’énergie radiative IR émise par la surface de la Terre. Ce sont ces gaz qui sont à l’origine d’un réchauffement de la surface terrestre (Ts > 255°K), expliqué par le modèle radiatif. Les physiciens, spécialistes de l’atmosphère, appellent cela l’effet de serre !

Bien entendu, il faudrait développer un modèle beaucoup plus complexe pour étudier cette question de l’effet de serre dans tous les détails. Il faudrait notamment tenir compte des mouvements de convection de l’air, de l’évaporation et de la condensation de l’eau, de l’effet des nuages sur les flux radiatifs, de la formation et de la fonte de la glace, des échanges thermiques entre l’air et les océans, etc… C’est sur ces questions que le GIEC travaille sans relâche. Il utilise des modèles numériques et les améliore constamment. Dans son 5ème rapport, il s’agissait du CMIP5 (Coupled Model Intercomparison Project Phase 5). Dans la phase actuelle, CMIP6, plus de 20 centres travaillent sur une trentaine de modèles climatiques.

            Jean-Claude Keller,  février 2021

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CAPSULE scientifique à visionner :    COMPLÉMENT C   : L'effet de serre s'explique par l'équilibre des flux de l'énergie radiative et pas par la théorie des gaz parfaits